13Cine

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vendredi 4 avril 2014

Her

Her de Spike Jonze
Genre : comédie dramatique
Sortie le 19 mars 2014



Découvert par le grand public en 1999 avec le surprenant et délirant Dans la peau de John Malkovich, Spike Jonze, qui officiait avant en tant que metteur en scène de clip, pour Bjork par exemple,  n’est pas ce qu’on pourrait appeler un stakhanoviste de la caméra. Quatre films à son actif, le premier Being John malkovich,donc, ensuite vient Adaptation avec Meryl Streep et, il y a déjà quatre ans, l’adaptation cinématographique de l’œuvre de Maurcie Sendak  Where the wild things are, Max et les maxi monstres en français. Si dans son quatrième film, Her,  on retrouve quelques thèmes chers à Jonze (des gens ordinaires à qui il arrive des choses extraordinaires, pour n’en citer qu’un), on se rend très vite que l’on est face au film le plus lumineux et optimiste de son réalisateur, pour ne pas dire le plus humain. 


Dans un futur pas si lointain, nous faisons la connaissance de Théodore (Joaquin Phoenix, tout en retenue et arborant une belle moustache), en instance de divorce et employé dans une société qui propose de rédiger des lettres d’amour / remerciement / autre à la place des gens qui auront payé pour ce service.  Entre soirées remplies de solitude, de dirty talk téléphonique et de jeux vidéo next gen, Théodore traîne son spleen dans la métropole froide qu'est Los Angeles. Jusqu’au jour où il acquiert une OS, Samantha, et c’est le début d’une relation hors norme. 
Si le sujet pouvait laisser sceptique et entrevoir un film glauque et déprimant (on parle quand même d’un être humain triste comme un teckel qui s’entiche d’une IA qu’il ne verra jamais), le film de Jonze se pose en parfait contrepoint de cette hypothèse. Les premières scènes placent immédiatement le contexte. L’action a beau se passer dans un futur proche, on n'a aucun mal à imaginer que l’histoire pourrait très bien prendre place de nos jours.  Open spaces froids et désincarnés,  foules anonymes clouées à leurs smartphones,  et styles vestimentaires rétro. Et dès lors que l’on fait la connaissance de Théodore, employé sans éclat, solitaire mais pas seul, l’empathie se créée immédiatement. Jonze arrive dès le début à montrer du doigt le mal de la société moderne : la Solitude. Solitude sociale (rames de métro remplies de foules silencieuses), solitude sexuelles (dirty talk comico-pathétique au téléphone),  et servitude aux nouvelles technologies avec ces jeux vidéo qui insultent le joueur.  Et dès que Théodore fait la connaissance de Samantha, tout ce monde froid et désincarné vole en éclat. Car Samantha va réveiller Théodore, au sens propre comme au figuré et découvrir, elle aussi, un nouveau monde, Samantha étant une OS en constante évolution et construction, avec une soif de connaissance quasi infinie. Dès qu’elle entre en scène, le film devient alors lumineux et plus chaleureux, éblouissant comme un soleil qui aurait toujours été présent mais que Théodore aurait fini par oublier (cf : la scène à la plage, ou Théodore court dans les escaliers du métro pour débouler, ébloui, sur une plage bondée). Sortant le personnage principal d’un coma social dans lequel il s’était trop confortablement installé, Samantha va lui faire redécouvrir le monde, et réveiller des sentiments qu’il ne pensait plus pouvoir connaitre. Et c’est ce thème du retour à la vie et l’amour qui fait doucement glisser le film dans la catégorie des feel good movies.  Samantha a le bonheur et l’euphorie communicatifs et Jonze met en scène des scènes remplies de joie et de complicité entre un homme et son OS, à l’image de la séquence où Théodore se fait balader en aveugle par Samantha dans la ville redevenue soudainement pleine de vie, débordante de couleurs et d’énergie. C’est elle qui va également supporter Théodore dans épreuve de la clôture de son divorce, et le pousser à faire son deuil de la relation avec sa femme. La complicité entre Théo et Sam est telle que l'on oublie parfois qu’elle n’est qu’un programme, uniquement là pour accompagner son utilisateur.  Bercé par la bande originale composée par Arcade Fire, le film pourrait ne jamais se finir et laisser Théodore finir ses jours avec Sam, entre disputes et réconciliations, entouré de son amie Amy et de son collègue marié, compréhensifs et tolérants . Mais en début de dernier acte, un retournement de situation va très justement changer la donne et faire éclater en morceaux la romance du personnage principal . En un sens la révélation n’en est pas une, elle fait même preuve d’une certaine logique, mais preuve qu’encore une fois l’empathie et l’identification a fonctionné, car à l’instar de Théodore on accueille la nouvelle avec une certaine tristesse. Jamais une mise à jour d’un programme n’aura été aussi émouvante. Et si la voix de Samantha s'éteint en fin de métrage, c'est pour mieux laisser Théodore s'assumer seul, faisant la paix avec son ex femme et se rapprochant de son amie Amy, elle aussi amie avec une OS, pour la retrouver sur le toit d'un immeuble à attendre qu'une nouvelle journée commence. 
Comédie romantique ou fable remplie de poésie urbaine, le film de Jonze insuffle une bouffée d'air frais et d'optimisme, à la fois tendre et cruel, idyllique mais toujours juste dans sa description d'une relation amoureuse sincère mais impossible, qu'elle puisse inclure un homme, une femme ou une IA candide et naive.

Le petit cadeau qui va bien

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