13Cine

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mercredi 5 mars 2014

La grande aventure Lego

La grande aventure Lego de Phil Lord et Chris Miller
Genre : Lego system
Sortie le 19 fevrier 2014



Le projet avait quand même de quoi laisser sceptique. En effet si l'on peut accepter que la marque Lego puisse être à la rigueur exploitée sur d'autres plates-formes telles que le Jeu vidéo, avec des jeux tels que Lego Harry Potter ou Lego Lord of the rings, et encore ce n'est qu'une technique pour tenter de rapprocher les amateurs de construction Lego vers l'univers des consoles, l'idée de mettre en route un film Lego pourrait paraître particulièrement étrange, le métrage risquant de s'apparenter à un énorme placement produit dilaté sur 1h30. Après visionnage du film, soyons honnête, le métrage arrive à assurer le spectacle pendant une bonne heure avant de méchamment se vautrer dans sa dernière demi heure. Explications :

Aux manettes du film on retrouve Phil Lord et Chris Miller. Si les noms ne vous disent rien, sachez qu'ils sont aussi derrière un des meilleurs films d'animation des 10 dernières années : Tempête de boulettes géantes, film à la fois super fun et maîtrisé, habile mélange d'humour vraiment drôle et jamais abrutissant pour son public. Ce n'est donc pas vraiment une surprise de les savoir aux commandes d'un film Lego, film au concept casse gueule comme a pu l'être leur précédent film. Qui plus est, au delà du fond, ils ont montré un certain savoir faire sur la forme, maîtrisant à la perfection les nouveaux outils de l'animation. Ils sont pour beaucoup dans la réussite du film, à commencer par Miller, également scénariste. Parlons du scénario, d'ailleurs. Si le pitch n'est pas des plus originaux (un individu lambda de LegoVille est appelé à la rescousse par des êtres d'une autre dimension pour accomplir une prophétie, étant soit disant l'Elu qui mettra fin au règne de Lord Business), Miller en profite pour tout dynamiter et se permettre tout et n'importe quoi avec ses lego, surtout n'importe quoi d'ailleurs. 

Instant " raconte nous ta vie " : ON
Je ne sais pas pour vous, mais moi, avec mes Lego (ou mes playmobils, ça marche aussi), je m'amusais à mélanger les différents univers. Ca restait des Lego et du coup je pouvais mettre des astronautes dans un saloon, ou un cowboy dans une station orbitale.
 " Raconte nous ta vie " : OFF



Pourquoi je vous raconte ça ? Parce que Miller le fait pendant tout le film. Plutôt que de se limiter à son héros, l’héroïne et les autres protagonistes principaux (le méchant, le flic et le mage), dès lors que Emmet le héros arrive dans l'autre dimension, c'est un festival de n'importe quoi intégral. Vous y trouverez Batman, Superman, Gandalf, green lantern, Shaquille O'neal, des requins, un poney et même Chewbacca avec le faucon millénium. Et le pire dans cette histoire c'est que ça marche. Tous ont beau être des Lego, sans en être conscients d'ailleurs, ils sont avant tout des personnages ayant chacun leur univers et leur langage, d'où cette permanente confrontation de plusieurs concepts que rien ne relie entre eux, entre Batman qui vient piquer le moteur du vaisseau de Han Solo et Superman qui veut qu'on l'achève à la kryptonite, ne supportant plus Green lantern, super héros boulet par définition. Ce défilé de guest stars ne s'arrête jamais pendant la première heure du film, Miller en profitant également pour railler ces (ses) héros avec des petites piques (Batman en prend d'ailleurs plein la poire, surtout le Batman période Dark knight de Nolan, avec son " i'm batman " balançé d'une voix grave, et un côté très bourrin dans son attitude). Au delà d'offrir le plus improbable des crossover de super héros jamais vu sur un écran, Miller surexploite l'essence même du Lego : on peut tout démolir et reconstruire avec des Lego. Le côté modulable à l'infini du Lego donne l'occasion à Miller d'offrir des scènes de poursuite débordantes d'idées et d'originalité, à l'image de la poursuite en début de métrage, avec des héros pilotant tour à tour une moto se transformant au gré des attaques en vaisseau spatial. Le film est également efficace dans ses dialogues, souvent drôles et toujours trop sérieux comparés à la grande déconne ambiante (Batman et ses troubles identitaires ou le running gag sur la tendance suspecte de l'héroine à changer de nom un peu trop régulièrement). 
Si le scénario, tout du moins dans sa première partie est remarquable, la mise en scène est du même niveau. Vertigineuse par instant, et toujours maîtrisée. L'impression qui en ressort, c'est que les deux réalisateurs se sont vu donner la possibilité de faire tout et n'importe quoi en Légo. Chaque élémént du décor, chaque explosion, ou même vague de l'océan est en Lego. Le film est tellement riche à ce niveau qu'un seul visionnage ne suffit pas. La diversité des décors traversés (ou démolis) par les héros est remarquablement mise en avant. 


Le scénario et la mise en scène assurent donc le spectacle pendant la première heure, et malheureusement, c'est après que ça se gâte. Suite à un rebondissement dans l'intrigue (je vous la fais courte : Emmet se jette dans le vide inter-dimensionnel pour sauver son monde d'une explosion), le personnage principal se retrouve:

Dans le monde réel. 

Et oui, voilà la mise en abîme qu'il aurait mieux valu éviter. Et l'on découvre que tout ce qui a précédé (les vaisseaux, Legoville, le monde du western) n'était en fait qu'une gigantesque construction en lego dans une cave, et que les aventures d'Emmet et ses amis n'étaient que le résultat de l' imagination d'un gamin ayant outrepassé l'interdiction de son père de jouer avec ses Lego, père ressemblant fortement au méchant Lord Business, interprété par Will Ferrell. Et là le film se vautre dans ce qu'il avait royalement su éviter depuis le début, à savoir ressembler à un gigantesque placement produit. Et ce n'est pas la dérisoire tentative d'insérer du fantastique dans le réel, à travers Emmet qui vit dans le monde réel, qui va nous empêcher de subir 20 minutes de niaiserie totale à base de réconciliation père / fils, la colle qui fige tout c'est mal, il faut laisser s'épanouir la créativité, j'en passe et des pires. Les méchants sont en fait gentils, et le héros finit avec l’héroïne, laissant Batman sur le carreau. 
On se demande ce qui a pu justifier un dernier acte aussi raté, celui-ci détonant avec ce qui a précédé, tornade de déconne laissant place à un enchaînement de moments niais. Est-ce une fin imposée par Lego, histoire de rappeler que si vous voulez faire pareil, vous pouvez acheter tout ce que vous avez eu sous les yeux pendant le film ? Alors même si le dernier acte n’entache en rien le spectacle qui est proposé, la première heure est très fun à regarder, on en ressort avec une légère impression de gâchis, de bâclé, une volonté de contenter à la fois le grand public avec une morale cul cul la praloche (jouer avec ton papa aux Lego c'est supaire) et la firme Lego qui pour le coup ne pouvait rêver de meilleure publicité. Le dernier plan résume à lui seul le problème du film : la vie réelle vient parasiter la vie Lego, mieux vaut parfois se contenter de la fiction et de l'imagination.


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