13Cine

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samedi 29 juin 2013

Man of steel

"Man of steel" de Zack Snyder
genre: DC Classic
Sortie le 19 juin 2013

Pour apprécier Man of steel, il convient de faire deux choses: oublier la daube réalisée par Singer, grand moment de niaiserie et de n’importe quoi bricolé autour du mythe de Superman, et surtout oublier que vous êtes venu voir le dernier film du réalisateur de Watchmen, 300, Sucker punch etc…explications.

Superman begins
Ce qui frappe le plus, une fois le film terminé, c’est  qu’on a l’impression d’avoir vu un film de Christopher Nolan, avec tout ce que ça implique de défauts. Nolan, c’est le réalisateur de la trilogie Dark knight, et producteur, via sa boîte Syncopy, de Man of steel. Et c’est peu dire que l’on retrouve sans effort son style tout en non-finesse dans certaines idées et plans. Cette tendance à iconiser à mort  un héros, Superman qui tape la pose évoquant sans cesse Bruce Wayne en train de veiller sur Gotham City, et ce goût pour les phrases faussement profondes et lourdes de sens, du style « les hommes te suivront, il trébucheront, ils tomberont.. », «  ce sera un paria sur terre », «  peut être mais il deviendra leur dieu ».  Même les thèmes du film rappellent sans cesse les récents exploits de batman, la recherche des origines, apprendre à choisir son camp, des dilemmes moraux, j’en passe et des meilleurs. Et qui dit omniprésence de Nolan, dit mise en sourdine du style Snyder. Pour ceux qui ne connaîtraient pas trop, Zack snyder s’est fait connaître du grand public avec le remake de dawn of the dead en 2005, pour enchaîner avec 300, Sucker Punch, Watchmen, Le secret de Gah’oole. Des films maîtrisés, solides, et avec des tics de mise en scène parfois assez lourdingues, comme ces ralentis systématiques. Et bien dans Man of Steel, Snyder s’est pas mal freiné à ce niveau, réalisant un film d’excellente facture, du  point de vue de la mise en scène, se révélant plutôt doué pour les scènes de destruction massive, et dieu sait si il y en a pendant 2 heures,  avec des effets rappelant étrangement la série Battlestar galactica, avec ses zooms pendant un travelling, et ce dès qu’il s’agit de filmer un vaisseau spatial. Le problème avec Man of steel, c’est qu'il arrive après toute une série de films fantastiques ou tout explosait dans tous les sens, et l’originalité se trouvera plus dans la mise en scène que les séquences d’action en soi( l’affrontement à Smallville rappelant furieusement la baston en ville de Thor). Pas de surdécoupage et toujours une certaine clarté dans l’action. Dernièrement, il n’y a que chez Whedon et ses Avengers qu’on prenait autant de plaisir à tout voir exploser pour tout et rien, bien que Man of steel l’enfonce sans souci, la dernière demi heure étant un affrontement d’une puissance de destruction atomique, pas forcément justifiée par l’histoire d’ailleurs...et en parlant de ça…

                                         Krypton en guerre. et Russell Crowe, de dos.

Trop de flashbacks tue le flahshback
On retrouve au scénario David Goyer, collaborateur de Nolan, scénariste de Batman begins  et Blade, et le moins que l’on puisse dire c’est qu’on sent qu’il avait l’air pressé d’en finir avec les origines de Clark, tellement le film est assez bancal dans son écriture.Pour simplifier le film se découpe en trois parties distinctes : la première partie nous présente Krypton, où se déroule une guerre fratricide entre Kal-El, père de Clark et Zod, général rebelle, ayant tous deux une vision différente de la survie de leur Nation.  Kal-El décide donc d’envoyer son fils sur la Terre pour le sauver. La deuxième, traitant  de la fuite de Clark devenu adulte, est ponctuée de flashbacks et la troisième se met en route dès l’arrivée de Zod sur terre. Et autant vous dire que c’est le jour et la nuit niveau dramaturgie et intérêt, entre la deuxième et la troisième partie. Pendant  les 45 premières minutes, le film se découpe ainsi : Clark adulte en fuite/flashback/Clark adulte en fuite/flashback. Les personnages sont présentés n’importe comment, mention à Lois Lane qui semble sortir de nulle part et on suit sans ennui ni intérêt la petite enquête de Clark qui met la main sur ses réponses en même temps que sur Lois Lane. Seul problème, c’est que ces réponses vont activer le réveil de Zod, qui va réclamer la tête de Clark. Et là tout se remet en place, on retombe sur des rails assez familiers, Superman en protecteur de la Terre, et Zod en méchant qui aimerait beaucoup la faire péter. Et là, Goyer se fait plaisir comme un gamin qui aurait trouvé de la dynamite. Tout ce qui peut exploser explose. Son super héros est indestructible ? et bien il va s’en prendre plein la poire. Camion citerne, traversée d’immeuble, satellite en orbite, crashs d’avion et de missiles, c’est un festival pyrotechnique. On en oublierait presque que Superman est là pour protéger les humains, tellement Metropolis prend cher dans la dernière partie. Parfois ça confine au gratuit, comme cette scène où Zod rend visite à la mère de Clark, et devant son «  allez vous faire foutre », envoie et un gros kick dans la voiture qui vient exploser la baraque derrière la mère. Mais étonnamment le côté jouissif de l’ensemble reprend très vite le dessus, car comme je vous le disais, Snyder sait tenir une caméra. Ca en devient grisant. Il est important de préciser que le film ne se limite pas à un enchaînement d’explosions. Et c’est même là sa force, car entre deux moments d’action soutenue, Snyder et Goyer nous proposent quelques plages plus calmes et posées,  où pointe une réelle émotion, comme les retrouvailles de Clark et sa mère, ou les échanges  avec son père.

                  La ferme des Kent, 2 minutes avant que la voiture a gauche finisse dans la maison à droite        

Petit aparté sur le casting, qui contribue beaucoup à la réussite de l’ensemble. Henry Cavill arrive sans peine a faire oublier Brandon Routh, fadasse et trop lisse dans la peu de Clark, et il est entouré d’acteurs trop rares sur un écran, à l’image de Costner, parfait en père adoptif et Christopher Meloni, second rôle trop absent du cinéma US( si vous le pouvez, regardez infectés, il y est magistral).  Même Michael Shannon est impeccable en bad guy, némésis de Clark, son personnage bénéficiant d’un background un peu plus travaillé qu’à l’accoutumée. Amy Adams hérite par contre du rôle un peu un peu ingrat de Lois Lane, toujours la première dans les emmerdes, et finissant toujours dans les bras de Superman. Normal quoi.
                         
                         
                                          

Zimmer, partenaire officiel de vos Blockbusters
Je vous parlais de l’influence de Nolan sur le film de Snyder. Elle se ressent également beaucoup dans la bande originale. On y retrouve Hans Zimmer, à qui l’on doit la plupart des Scores de la filmographie de Nolan (les dark knight, inception) et ici, il fait le strict minimum, envoyant du gros son à percussion dès que ça explose, souvent donc, deux trois notes de piano qui illustrent le thème de Superman quand on souffle un peu, et hop on repart sur du lourd avec le même thème, mais avec 15 trombones et 3 tambours derrière. Tout en finesse. D’ailleurs je vous propose de juger sur pièce, un extrait de la bande originale est disponible en bas de cet article. Le thème de Superman d’ailleurs, parlons en, il est à des années lumière du thème original composé pour le personnage. Pas inoubliable, assez basique, Zimmer a fait beaucoup mieux et ailleurs, avec son morceau Up is down  pour pirates des caraibes 3 , ou encore time sur la bande originale d' Inception, par exemple. Je vous laisse découvrir tout ça sur Youtube, ça en vaut vraiment la peine.


Pour résumer, Man of steel reste quand même, malgré les défauts d’écriture et la Nolan’s touch omniprésente, un excellent blockbuster, aussi fun à regarder que star trek into darkness, et qui laisse augurer du meilleur pour la suite des aventures de Superman. ça m'a rincé les yeux après World War Z. 



vendredi 28 juin 2013

World War Z

"World War Z" de Marc Forster
genre: Pas Z mais franchement raté.
Sortie le 03 juillet 2013

Ce qui est bien avec WWZ, c'est qu'il est un parfait exemple de film dont la production et les emmerdes à répétition durant celle ci son franchement plus passionnantes que le film en lui même, daube inoffensive au demeurant. Aussi je vous propose ce petit dossier, que j'espère assez complet, sur WWZ, du livre jusqu'au film. 

World War Z , Le livre
Au commencement, WWZ est un livre, écrit par Max Brooks. Ce n'est pas un roman, mais un recueil de témoignages de survivants de la World War Z, sorte de 3ème guerre mondiale, opposant humains et zombies. Le narrateur se balade aux quatre coins du globe pour recueillir ces récits, de l'Afrique à New York, en passant par la Chine et la Corée du sud. Soyons honnête, ce  livre n'est pas l'oeuvre la mieux écrite du siècle, l'auteur ayant tendance à s'auto-citer toutes les 100 pages, en faisant référence à son " guide de survie en territoire zombie" via ses protagonistes, et surtout le rythme accusant de sérieuses baisses de régime, s'engluant parfois dans des digressions politico-philosophico-nazes. Mais c'est aussi une mine à bonnes idées. Le concept en soi est plutôt original, l'Humanité face à une armée de zombies, et certains chapitres sont plutôt efficaces. Pourquoi je vous en parle, parce que ces passages clés et importants, vous ne les verrez pas dans le film. Citons, dans le désordre, le Projet Afrikaneer, qui nous présente les riches africains se servant des plus pauvres comme appât à zombie, le concept du quisling, ou comment des humains devenus fous sont persuadés d'être des zombies, une fuite dans les égouts parisiens, un exode des américains en territoire canadien, et surtout la bataille de Yonkers, la plus grosse défaite des hommes face aux non-morts, ou comment les USA se prennent une branlée monumentale, débordés et massacrés dans un affrontement ou chaque humain tué devient un ennemi. De plus, Brooks a la bonne idée de ne pas céder aux sirènes du " zombie runner", et en revient aux bases du zombie, traînant et gémissant. L'image d'une armée gémissante et indestructible se relevant d'une attaque, vaine, au napalm est assez marquante. 

                                         un fan-art sympathique sur la bataille de Yonkers

Voilà pour ce qui est du livre. 

Production hell
La suite est assez  simple à deviner, Hollywood n'a pas traîné et a entrepris une adaptation de l'oeuvre de Brooks sur le grand écran (bien qu'à mon avis, une série aurait mieux convenu...) avec Brad Pitt en personnage principal. Et là première galère, La production et Pitt choisissent comme réalisateur Marc Forster. Ce nom ne vous dit rien? Voici sa filmo: Neverland, à l'ombre de la haine, le cerf volant de kaboul et surtout son coup d'éclat, Quantum of solace. Oui il a mis en scène le plus somnifère des derniers James Bond, avec sa pub Audi en guise d'intro et son climax tout pourri dans le désert. Un mec sans talent particulier, assez servile et pas trop chiant pour les producteurs. Mais voilà, quitte à choisir un réalisateur, autant s'assurer qu'il sait ce qu'il fait, et malheureusement Forster, ben, il ne sait pas. Les retards commencent, Le réalisateur ne sachant pas quel look donner à ses zombies ( ça se voit à l'écran, ça part dans tous les sens), hésitant entre le coureur ou le lent gémissant.  Une fois ce problème résolu, reste à gérer cette grosse machine en devenir qu'est WWZ. Et c'est reparti pour un enchaînement d'emmerdes comme seul Hollywood en a le secret. Le film étant rempli de militaires, ces gens ont besoin de costumes, mais aussi de fusils. Pas de bol, les fusils utilisés pour le film étaient juste entrés illégalement en Hongrie. Retard à nouveau.
Le film a besoin de figurants? Pas grave, il y en a plein, parfois jusqu'à 700 à l'image. Le souci c'est qu'on pas forcément prévu de quoi tous les maquiller...quand ça veut pas...Entre ce genre de galère et les embrouilles entre le réalisateur et Pitt, vous commencez à comprendre le chaos qu'a été la production de ce film pendant 2 ans. Mais le plus drôle reste à venir.
World War Z a connu quelques déboires, niveau scénario, surtout concernant la deuxième partie du film. Dans une des premières versions, qui a semble t-il été tournée, du moins en partie, le personnage de Pitt se retrouvait en Russie et livrait bataille contre des zombies. Toujours est-il que ça n'a pas convaincu. La Production a donc fait appel à Damon Lindelof. La Fin pourrie de Lost, c'est lui. Les envolées religion/SF de Prometheus, c'est lui. Il a donc réécrit le deuxième acte. Vu le résultat final, je ne vous remercie pas Damon.  Souci de taille, Lindelof est un homme très demandé, et il quitte le navire, laissant sa place à Drew Goddard, réalisateur de la cabane dans les bois, qui vient poser sa pierre à cet édifice branlant. Pas de bol, Goddard est sollicicité par Spielberg pour plancher sur Robopocalypse, son prochain film. Dernière bouée à la rescousse, Christopher McQuarrie, qui a pu (du?) sauver les meubles.  
Et le moins que l'on puisse dire, c'est que ce côté bordélique se ressent à chaque instant dans le film, que ce soit dans la mise en scène, impersonnelle et sans talent, et dans l'écriture, complètement à la rue, sans suite logique et particulièrement foirée dans le dernier acte du film , avec une fin fini à la truelle. 
Pour vous donner une idée du désastre, un calcul effectué par nos compères de Vanity fair nous apprend que pour rembourser toutes ces conneries, le film devra faire au moins 400 millions de dollars de bénéfices..
mais bon, trêve de blagues, le film en soi, il vaut quoi?

D'un Z qui veut dire...d'ailleurs qui veut dire quoi, exactement? 
Comme je vous le disait, le film ayant connu quelques soucis en production, le résultat se regarde entre déception, interrogation et consternation. 
Je vous avouerais que je suis un grand fan de films de zombie. De  white zombie à Dawn of the dead, en passant par Shaun of the dead et dead of night, je trouve le thème du zombie fascinant. J'avais été traumatisé par le curé dans le film de Romero, avec son " quand il n'y a plus de place en enfer, les morts reviennent sur terre", et agréablement surpris par le remake de Snyder et ses zombies coureurs. J'avais beau avoir grandi avec le cliché du non-mort traînassant, le film m'avait marqué. Et bien quand je vois WWZ, ça me fait vraiment ch**r

Dèjà le film commence assez brutalement, avec une scène d'exposition très Ricoré, pour nous présenter Gerry, interprété par Pitt, agent de l'ONU rangé des voitures et maintenant homme au foyer; badass!!!
Bref, la suite, ben vous l'avez dans la bande-annonce, l'horreur arrive en ville. avec ses légions de Z bondissants ( WTF?) et coureurs de fond. S'ensuit une fuite de la ville en camping car, et déjà là on sent qu'on va prendre cher niveau crédibilité. Tout le monde se fait boulotter sauf Pitt et ses gosses, et il se casse de la ville en 1 minute, montre en main. Sans déconner: Plan 1 camping car se dirigeant vers un pont bondé. Plan 2, camping-car en cambrousse. Normal quoi. La scène de fuite de la guerre des mondes de spielberg c'est virtuose à côté de ça.
La mise en scène de Forster est déjà à l'image du scénar, en roue libre. Aucune tension, on ne voit jamais les zombies ( mais ça on sait pourquoi, voir plus haut), et il ne sait toujours pas filmer des scènes d'action ( 9 plans pour un camion qui se couche, bien joué Marc). Alors je ne vous raconte pas quand il y a des zombies ET de l'action. La suite, et bien les chefs de Gerry font appel à lui pour élucider le mystère. Direction la Corée du sud et Jérusalem. Et c'est d'un chiant... Gerry qui fait du vélo pour pas attirer les Z, Gerry qui se fait remarquer par les Z parce que sa femme l'appelle sur son téléphone qui sonne ( GAG!)...et après on file à Jérusalem pour le morceau de bravoure du film, une course poursuite dans les rue de la ville, où encore une fois on verra qu'une masse de Z se faire péter à la grenade et défoncer des portes. 
Petite parenthèse pour souligner que Forster use et abuse du CGI pour nous montrer les Z, les rendant limite trop rapides à l'image, ce qui tranche radicalement avec le coté larve qu'il leur donne en deuxième partie de métrage.

                                                       un petit côté lemming non mort

S'ensuit une fuite en avion assez cocasse. Je ne vais pas vous spoiler le film, mais sachez que ça part en sucette assez rapidement. Là, le film rétrograde en seconde, voire première, puisque Gerry, surhomme en puissance, se retrouve en Ecosse, coincé dans un complexe de l'OMS. Et là c'est le drame. En effet, Je vous disait plus haut que dans une des première versions du film, on avait droit à une bataille rangée en Russie. Au final dans la version réécrite de Lindelof, vous aurez droit...à un film de couloirs, un vrai. Et ça papote en regardant un PC, et j'ouvre une porte, et je la referme, sous le regard absent des zombies qui ne bougent plus. Et en 3D s'il vous plait. 
Mais comment la Production a t-elle pu valider cette idée à la con de faire errer Pitt dans un laboratoire? plus d'argent du tout? On s'ennuie copieux pendant une bonne demi heure. La résolution de la pandémie nous vaut encore un instant tout mignon tout choupinou, avec plein de dialogues pour nous expliquer ce qu'on avait déjà compris depuis 5 minutes. Affligeant de bêtise.

                                          la partie de cache-cache la plus molle du monde

Apocalypse pour les touts-petits
Un des gros points noirs du film c'est son absence totale de tripes. Au sens propre comme au figuré. Le livre original était parfois courageux dans ses idées (sacrifice des pauvres, mutilation de gamins, massacres en series), mais à aucun moment le film n'en suit une. Ca reste mainstream, lisse et propret. Pire encore, les Z en question sont sensés dévorer les vivants, c'est dit à plusieurs reprises d'ailleurs, et on se retrouve avec un film de zombie PG-13 ( équivalent US du tout public français), sans effusion de sang ni violence graphique. ou si elle est à l'écran, on ne la voit pas, Forster ayant recours à la shakycam pour ses plans serrés et de baston ( la scène de l'avion)
"j'ai voulu faire un film de zombie que mes gamins puissent regarder" Brad Pitt
quel age ont ses gamins déjà??..Merci Mr Pitt.

Pour conclure, on peut définitivement qualifier World war Z d'énorme gâchis, beaucoup d'attente et finalement un pétard mouillé à l'arrivée. Vous voulez voir une vraie scène de panique en ville, revoyez l'intro de L'armée des morts, et puis je vous conseille de jeter un œil au film the dead des Ford Bros. 200 fois moins de budget, 1000 fois plus de tripes. dans tous les sens du terme



mardi 18 juin 2013

Shokuzai, celles qui voulaient oublier

Shokuzai, celles qui voulaient oublier de Kiyoshi Kurosawa
genre : Fin de pénitence
Sortie le 05 Juin 2013


Deuxième partie de la série Shokuzai, mini-série réalisée pour la télévision japonaise  par Kiyoshi Kurosawa, qui nous dévoilait ce que sont devenues 4 fillettes, témoins impuissants de l'enlèvement de leur amie, et à qui la mère a promis une existence de pénitence si aucune d'entre elles ne trouvaient un indice pour retrouver le meurtrier de la gamine. Le premier volet, celles qui voulaient se souvenir, nous présentait Sae, devenue femme au foyer soumise a un mari fétichiste des poupées et Maki, institutrice se retrouvant dans la tourmente suite à une agression sur des enfants qui fait remonter de douloureux souvenirs. Sans oublier la mère de la défunte Emiri, Asako, qui viendra à intervalle régulier leur rappeler leur engagement. Pour faire court, les deux demoiselles finiront par mettre fin à leur engagement, l'une par le meurtre et l'autre dans la mort. Voici donc la deuxième partie de cette pénitence.

Chapitre 3:  L'ours. Et un peu de cornemuse.
Il est bien question d'ours, oui le plantigrade, dans ce chapitre. Celui-ci est consacré à Akiko, jeune femme mal dans sa peau, ne sortant jamais de la demeure familiale, passant le plus clair de son temps à jouer à la console ou avec des insectes. Pourquoi cette volonté de s'isoler et ne jamais sortir de sa caverne? Tout simplement parce que Akiko est la fillette qui a annoncé à Asako la mort de sa fille, et qui, suite à la menace de Pénitence éternelle de la maman, a plus ou moins renoncé à sa condition de femme, voire d'être humain. Retour à l'état animal donc. D'où l'ours. Ce petit monde va être chamboulé par l'arrivée de son frère, sa femme et sa belle-fille. Celle ci va se rapprocher d'Akiko, et lui expliquer qu'elle a vraiment peur de son beau père, aux tendances plus que suspectes. 
Chapitre particulièrement réussi, avec un suspens habilement dosé, tout le segment est en fait un flahsback, nous montrant une Akiko racontant son histoire à Asako, depuis une prison. Il y est beaucoup question de culpabilité, Akiko n'ayant semble t-il jamais réussi à s'affranchir du poids de la menace maternelle, et de rédemption. En effet, dès lors que les sombres desseins du frère sont clairement exposés, Akiko va tout faire pour sauver l'enfant victime de l'adulte, ce qui sera l'occasion de regarder la scène la plus dure et à la fois la plus émouvante du film, lorsque la gamine supplie Akiko de ne pas la laisser repartir avec son beau père, et que celle ci, d'abord cloîtrée dans sa panique et son indécision, décide trop tard de courir après la voiture de son frère. Sans trop dévoiler la conclusion, le chapitre s'achève de manière cruelle, avec encore Asako, venue enfoncer une dernière fois Akiko, désemparée devant la froideur de la mère, refusant de valider son acte de repentance. 
Mention à la comédienne Sakura Ando, vu chez Sono Sion et son love exposure, excellente en jeune femme passant de témoin passif à lionne vengeresse en deux coups de corde à sauter, ainsi qu'à la BO, très orientée cornemuse et Cornouailles.

                                méfiez vous de l'eau qui dort. Là elle en pleine session retro gaming

Chapitre 4 : des fleurs et des flics
C'est maintenant à Yuka de passer sur le devant de la scène. Yuka est une jeune fleuriste, à qui tout semble réussir, et elle heureuse. Et c'est là qu'on se dit que finalement, elle a réussi à ne pas suivre la voie des trois autres filles, condamnées à s'auto flageller pendant toute leur existence. Ce serait trop beau. Le problème de Yuka, voyez vous, c'est qu'elle a comme qui dirait un faible pour l'uniforme. L'uniforme ça la rassure ( on nous explique que ça date de la mort d'Emiri, la première personne à avoir tenté de rassurer Yuka, c'était un policier), et ça tombe bien, le mari de sa sœur est policier. Je vous laisse deviner comment la suite se goupille. 
Ce chapitre détonne franchement avec les autres. Dans sa forme déjà, il est beaucoup plus lumineux, moins austère dans ses cadres et ses couleurs. Ensuite, comme je vous le disais précédemment, on est d'abord agréablement surpris de voir Yuka, jeune femme aventureuse(elle entretient une liaison avec son patron) profiter de la vie. Mais le souci, c'est que dès que sa sœur et son mari entrent en scène, on découvre une Yuka complètement tarée et manipulatrice, jalouse comme un pou, égoïste et briseuse de ménage. On se dit que la seule personne qui serait capable de la calmer, c'est Asako. Et bien non, raté. même lorsque se rencontrent les deux femmes, Yuka, enceinte jusqu'aux dents, lui en fout plein la tronche et lui fait du chantage car Yuka, malgré son insouciance et sa légèreté, est la seule à avoir retrouvé la trace du meurtrier d'Emiri.  Bref je ne vais pas vous tuer le suspens, mais ce chapitre conclut en beauté le récit des destins des 4 filles, la dernière scène de ce chapitre amenant le dernier, consacré à Asako, aux trousses du tueur de sa fille.

                                        Celle qui voulait oublier. Celle qui voulait se souvenir

Chapitre 5: Atonment
Ultime chapitre consacré à Asako, mise sur les traces du tueur par Yuka, qui lui a révélé où se trouve celui-ci. Le problème étant que le-dit tueur est une vieille connaissance d'Asako. Ne tournons pas autour du pot, la déception concernant le dénouement est à la hauteur des attentes. On suit Asako espionner mollement son ancien ami de lycée, on les regarde se retrouver, papoter, s'envoyer des vacheries, régler leurs comptes, et même si la fin réserve son lot de surprises et de révélations, notamment sur la relation tueur-Asako-Emiri, on est un peu déçu par un dernier quart d'heure poussif, à base d'interrogatoires de police et de révélations en cascades. Mais le pire dans cette histoire, c'est que lorsque tout se remet en place (qui a fait quoi, et qu'est ce que cela a entraîné), on en vient à avoir vraiment de la peine pour les quatre jeunes femmes aux destins brisés inutilement, Asako ayant aussi sa part de responsabilité dans l'affaire, et pas des moindres. Reste un plan final magnifique, avec une Asako attendant son "Jugement", noyée dans un brouillard fantomatique.


samedi 15 juin 2013

Star Trek into darkness

Star Trek Into Darkness de J.J Abrams
Genre: Suite mais pas remake
Sortie le 12 juin 2013


Il y a 4 ans, la saga Star trek avait été remise au goût du jour par JJ Abrams, redonnant un coup de fouet et une reconnaissance publique à un univers à la fois riche mais pas forcément connu de tous, Spock et Kirk étant, sans vouloir généraliser, les emblèmes de ce mythe qu'est Star Trek, et tout ce qui s'y rattache, comme les téléportations, le salut vulcain...
Le film en soi n’était pas mauvais, loin de là, mais avait quand même quelques défauts qui l'empêchaient d'accéder au statut de grand film de SF, à commencer par un bad guy pas inoubliable, des scènes censées être drôles mais qui tombaient souvent à plat (l'hommage involontaire à Coluche et Banzai), et des gros clins d'oeil lourdingues de fanboy, via l'apparition de Nimoy. Un bon point cependant, le score était monstrueux (Giacchino je t'aime). Gros carton au Box office, le film appelait, de par son plan final, une suite. C'est chose faite.

Voici donc la suite des aventures de l'équipage de l'Enterprise, aux proies cette fois-ci avec John harrison, ancien de la Flotte Starfleet, terroriste revanchard menaçant la Terre et repoussant la Flotte à des limites qu'il ne faudrait pas franchir, surtout quand on a pour voisin les klingons, race extra terrestre belliqueuse.
Alors, pour tout vous avouer, je ne suis pas, mais alors pas du tout, expert en Star Trek. Je suis incollable sur X-Files, mais pour ce qui est de toute la (les) saga(s) des passagers de l'Enterprise, je suis un vrai profane, mes connaissances se limitent à quelques saisons avec Picard dans la série Star trek la nouvelle génération, et celles avec Sisko, il me semble que c'est Deep space nine.
Pourquoi je vous dis ça ? Parce qu'aux deux tiers du film, lorsque Harrison est fait prisonnier, il révèle son vrai nom : Kahn. Pour info, le deuxième volet cinématographique de la saga s'appelait La colère de Kahn. Pas de chance je ne me souviens plus des grandes lignes, sauf la fin avec la mort de Spock. Ceci dit, il n'est pas nécessaire d'avoir vu ce dernier pour apprécier le film d'Abrams à sa juste valeur et pour ce qu'il est: un divertissement de très bonne facture et maîtrisé. Je pense qu'en matière de Block Buster 2013, il met déjà la barre haut niveau qualité. Je m'explique.

                           Ca pète encore plus sur un grand écran avec le score de Giacchino en fond.

Ce qui est étonnant avec Abrams, c'est qu'il donne l'impression de s'améliorer et de peaufiner son style film après film. Super 8, son précédent métrage, hommage aux productions Amblin sous influence spielbergienne était déjà une très bonne surprise, spectaculaire quand il le fallait, avec notamment le déraillement du train, et efficace dans les scènes plus intimistes, parfois avec maladresse mais toujours avec générosité.
Et bien là c'est pareil.
Abrams a le sens du spectacle et du rythme. La scène d'introduction, hommage à Indiana Jones, met immédiatement le spectateur dans le bain, avec un côté très "voilà où on les avait laissé", C'est-à-dire à la découverte de nouveaux mondes et de nouvelles peuplades, et le moins que l'on puisse dire c'est que le côté immature de Kirk n'a pas évolué d'un pouce, puisqu'on le découvre avec McCoy en train de se faire courser dans les champs, après avoir profané un temple ; la séquence se termine avec un plan magnifique de l'Enterprise qui sort de l'océan.
La suite du film sera par contre moins spectaculaire. Non pas qu'il n'y aura pas d'action, mais Star trek est un film où les parties disons plus posées sont aussi importantes et essentielles que les scènes d'action, qui ne sombrent jamais dans la surenchère gratuite. Rien n'explose sans raison, pour simplifier. Le rythme se calme en deuxième partie de métrage dès lors que Khan se livre à la Flotte, nous dévoile son passé et ses intentions, guidé par la haine envers Starfleet et ses représentants.
Concernant le scénario, il est d'ailleurs intéressant de remarquer que Star trek partage plusieurs similitudes avec nombre de blockbusters récents dans son déroulement, avec cette tendance à enfermer son méchant dans une cellule de verre pour mieux en prendre plein la gueule après (Silva dans  Skyfall, et Loki dans Avengers) ou bien la prévoyance du bad guy quant aux agissement des héros (dans Skyfall, Silva anticipait les déplacements de M, pour mieux la piéger, ici Khan fait péter Londres pour générer une réunion de crise avec les chefs de Starfleet...je vous laisse voir la suite).
J.J Abrams se permet même un double climax en fin de métrage, avec la mort d'un des personnages principaux après une course poursuite dans un vaisseau Enterprise qui tourne sur lui même (séquence qui fout à l'amende la scène du couloir dans  Inception), pour  mieux repartir de plus belle avec une chasse à l'homme et une baston très Minority report dans l'esprit. Côté scénario on remarquera au passage que certains dialogues ne font parfois qu'enfoncer à coup de bélier ce qu'on avait déjà compris depuis 5 minutes, mais les retournements de situation entraînent un glissement de l'empathie vers différents personnages (qui est le vrai méchant au final ?) qui rend le film encore plus intéressant...

                            L'ennemi N°1. Interprété par Benedict 'charismatique' Cumberbatch

Je vous parlais des progrès de Abrams à la caméra. Le moins que l'on puisse dire, c'est que ça fait plaisir de voir un blockbuster avec des scènes d'action lisibles. Car oui, un film peut être spectaculaire sans trop en rajouter et apporter une certaine crédibilité à l'ensemble. Alors certes, des fois Abrams a le même souci que Nolan dans ses Batman : il sur-découpe ses scènes et quand il y a des fusillades, on finit par ne plus savoir qui tire sur qui, et qui se trouve où, mais il se rattrape dans les scènes de destruction massive et à grand spectacle, sans effets inutiles, et là je pense à la scène du crash du vaisseau amiral en fin de film, tout en plan large et très réaliste (toutes proportions gardées hein! un vaisseau de 100 mètres de long qui se vautre dans des buildings de 200 étages... ça se passe en 2055 !!). On reconnait aussi la Abrams's touch avec ses lens flares à tire larigot dès qu'un projecteur s'allume.
 
Un petit mot également sur le casting. Si l'on retrouve la petite bande de l'original (Pine, Quinto, Saldana et compagnie...), deux nouvelles têtes émergent au dessus de la masse : Peter Weller, inoubliable interprète de Robocop et acteur chez Cronenberg dans le festin nu, parfait ici en ordure sans cœur ni valeur, et surtout Benedict Cumberbatch, acteur au charisme monstrueux (vu dans la série Sherlock et au cinéma dans La taupe), bouffeur d'écran qui fout des frissons à chaque fois qu'il menace de tout faire péter avec sa voix grave et ses yeux de fou ivre de vengeance. La surprise du film c'est lui. 

                                   Pas de doutes, nous sommes bien dans un film d'Abrams.

Abrams a également eu la bonne idée de confier à Michael Giacchino le soin de composer la bande originale du film. Il n'y a pas à tergiverser, cet homme a du talent et ça s'entend. On y retrouve donc le thème principal de  Star trek  next-gen, et le thème de Khan est une vraie merveille. J'attends avec impatience son score pour la suite de la Planète des singes.

Après, on pourra toujours reprocher à Abrams de ne pas trop se mouiller niveau dramaturgie, n'osant jamais aller trop loin dans ses choix narratifs (encore que pour le scénario, celui qui est à blâmer ce n'est pas lui directement) et de recycler la dernière scène du premier film pour conclure le deuxième volet, mais en toute honnêteté, quand il y a un bon film de SF, parfois drôle, parfois émouvant, mais généreux à tous les niveaux (le coté fanboy de Abrams est plus que jamais évident), il faut en profiter. En attendant Man of steel.

Et puis ça faisait longtemps, alors voilà, cadeau: Giacchino je t'aime encore 



             

vendredi 14 juin 2013

Oh boy

"Oh Boy" de Jan Ole Gerster
Genre: VDM berlinoise
Sortie le 5 juin 2013


Je ne connais absolument rien du Cinéma Allemand et j'ai tendance à ne pas foncer dans une salle obscure dès qu'un film produit outre-rhin arrive sur les écrans français. Mais là je ne sais pas si c'est la bande-annonce qui laisse augurer du meilleur, ou si c'est la pluie de récompenses qu'a récolté le film aux Lola ( meilleur film, meilleur acteur, meilleur scénario, meilleure musique, meilleur second rôle, meilleur réalisateur..), toujours est-il que j'étais curieux de voir ce film. Disons le d'emblée, le film ne mérite pas toutes les récompenses énumérées ci dessus. 

24h dans la peau d'un VieDeMerde
Le film raconte les mésaventure de Niko, jeune (presque) trentenaire, qui vivote entre déménagement, plans foireux avec ses amis, interdit bancaire et doutes existentiels. Le mec s'en prend plein la poire pendant tout le film, et pourtant le métrage ne sombre jamais dans le dramatique (exception faite dans la dernière partie..et encore) oscillant entre vraie comédie et portrait tragi-comique d'un looser sans repère. Et c'est d'ailleurs une des qualités premières du film. Les mésaventures de Niko auraient pu sombrer dans le triste et le déprimant ( ça aurait été chiant d'ailleurs, un film triste et en noir et blanc), mais là le métrage reste toujours assez léger, et on rit plus des emmerdes qui s'accumulent sur le héros qu'on n'éprouve une quelconque pitié. Première parenthèse pour saluer l'interprétation de l'acteur principal, avec sa tête de mec complètement perdu, qui subit plus qu'il ne contrôle pendant son marathon des emmerdes. L'empathie fonctionne plus que jamais, Niko étant confronté à des situations d'une banalité sans fond, mais qui prennent des proportions épiques, grâces à des dialogues souvent très drôles ( l'échange avec le psychologue au début du film ).
Concernant le scénario, il ne méritait pas nécessairement un Lola, on a malheureusement souvent l'impression de regarder une succession de saynètes , avec au début du film un fil rouge, Niko cherchant désespérément un café à boire. Alors ces saynètes sont parfois drôles, parfois tristes ( la partie de golf où on découvre le père de Niko ) et même touchantes , comme la scène du fauteuil à la grand mère, mais elles donnent à l'ensemble une impression d'assemblage d'instants pris ça et là, sans grande cohérence ( la fin arrivant assez abruptement d'ailleurs). Le film trouve cependant un deuxième souffle narratif dès qu'entre en scène Julika, vieille connaissance de Niko, qui le reconnait. Alors que lui, non. Pas du tout même. Et elle aussi traîne quelques casseroles. Remarquons quand même la volonté de proposer un unhappy end, vrai choix couillu de la part du scénariste.

                                 Julika. anciennement " Julika le gros tas". Sociopathe de son état.


Deuxième qualité du film: sa bande originale. Composée par the major minors, elle fait baigner le film dans une ambiance à la fois légère et intemporelle, jazzy et rythmée, ajoutant une touche comique à la journée pourrie de Niko. Elle arrive à booster le film, ce que malheureusement la mise en scène n'arrive jamais à faire. Le film n'est pas un exemple en matière de mise en scène, le noir et blanc n'étant sans doute là que pour rendre hommage à la nouvelle vague et donner un petit côté indé et intemporel., mais en soi ça n'était pas indispensable. Le film étant très bavard, n'attendez pas de prouesses pour filmer tous ces échanges, c'est une suite assez convenue de champs/contre-champs. Le Lola musical est beaucoup plus justifié que celui ramassé pour le meilleur réalisateur..

                                   Ma vie c'est de la merde. Aujourd'hui : la visa ne ressort pas.

Das ist Berlin

Mais ce qui rend ce film attachant au final, c'est le côté universel des aventures de Niko. Cette volonté de raconter une tranche de vie somme toute assez banale, loin de toute exagération, c'est ce qu'on retient au final, Niko est une jeune homme paumé, à tout point de vue, son père l'a déjà 'remplacé', il n'ose pas s'engager, fait des conneries, et en fait d'autres en essayant de les rattraper, il est attaché à ses amis même si ces derniers sont au moins aussi perdus que lui, il n'a plus une thune et se prend de grand coups dans les rotules par le destin, bien décidé à le faire grandir et mûrir. l'histoire pourrait très bien se passer à Paris ou à Londres, les emmerdes seraient les mêmes.

Alors si vous cherchez un film léger, sans prétention ni message à vehiculer, plein de bonne volonté et de bonne humeur, je vous le recommande.

mercredi 5 juin 2013

After Earth

"After Earth" de M.Night Shyamalan
Genre : Tu seras un homme (des bois) mon fils.
Sortie le 5 mai 2013


Vous vous rappelez qui est Shyamalan? 
Cet homme qu'on avait découvert avec Sixième sens et son fameux twist final, qui avait reçu tout autant de louanges avec son film de super héros à lui, Incassable, et son twist. Après ça a été moins fameux, moins mémorable. Shyamalan s'était lancé dans des théories sur le hasard et la religion avec Signes, l'évolution et la Société avec Le village, et enfin les contes pour enfants avec la jeune fille de l'eau.
D'un point de vue qualitatif c'est la dégringolade, et au final tout ce qu'il y avait à sauver c'était soit la photo de Fujimoto, soit les scores de James Newton Howard.  

Le point de non retour avait été franchi, tout du moins le pensions nous, avec son dernier film,  Le dernier maître de l'air, tentative d'adaptation foirée dans les grandes largeurs. Rien à sauver. Ou si peu... 
Et bien non! Shyamalan est donc de retour avec ce film de science-fiction, au message écolo lourdingue, doublé d'une histoire d’apprentissage de la Vie, tu seras un homme mon fils, tu ignoreras la peur...Le tout mis en scène et écrit avec la finesse d'un ouragan. 
Produit par et pour toute la famille Smith (on parle de 130 millions de dollars de budget, le film familial le plus cher du monde), on en oublierait même des fois qu'il y a Shyamalan - ou quelqu'un d'autre d'ailleurs - derrière la caméra. 
Ça part dans tous les sens, mais jamais dans le bon.

Copain des bois
Comme je le disais plus haut, ce film est avant tout un voyage initiatique doublé d'une belle morale sur la meilleure façon de surmonter ses peurs. 
On suit les mésaventures de Kitail, jeune cadet qui rêve de devenir soldat, pour faire plaisir à son papa, Cypher, super soldat, pourfendeur de monstres. Bref, les deux générations en conflit entreprennent donc d'effectuer un voyage ensemble. Malheureusement leur navette se crashe sur terre, qui dans un futur proche, est devenue hostile (comprenez les animaux sont en liberté, des faucons, des singes...et même des sangliers!!). 
Nos deux compères sont dans la tête de la navette mais la balise de détresse se trouve dans la queue du vaisseau, crashée à 100 bornes d'ici... Papa étant paralysé (Smith est dans un fauteuil pendant tout le film. Il ne bouge pas...son jeu facial est priceless. J'y reviendrai) c'est Kitail qui va partir en randonnée. Un peu comme le scénariste d'ailleurs...

Ce film est une accumulation de clichés et de situations toutes plus pourries les unes que les autres. D'entrée de jeu on nous explique la situation dans un flashback qui doit durer 2 minutes montre en main (pollution= exode des terriens= rencontre avec les aliens= guerre contre les aliens= recrutement de soldats. Voilà! c’était pas dur...) et on doit se cogner des dialogues entendus 20 000 fois ailleurs, avec tous les poncifs du conflit père-fils (déception, rancœur, culpabilité, jalousie..). 
Puis, une fois que nos lascars sont en forêt, le rythme ne décolle jamais, la faute à des péripéties inintéressantes au possible. On nous dit que la terre est hostile et que la nature s'est adaptée à l'absence des humains... moi j'attendais des animaux mutants. Que nenni! Kitail se frittera avec des singes, un aigle ou bien encore une panthère et les 3/4 du temps, il prend la fuite. J'oubliais de vous préciser que dans le vaisseau était retenu un Alien, dont la particularité est de sentir la peur.
La peur est un choix...tu la vois la métaphore sur le monstre qui se nourrit de ta Peur..???
Il ne se passe rien, jusqu'à ce qu'il arrive à destination et encore, là, c'est sans surprises qu' il triomphe de ses peurs (cf. la ligne ci dessus).
Ce n'est pas avec ce film que commencera en fanfare l'été 2013 des blockbusters...

              Le fiston, en pleine randonnée, avec sa combi qui change de couleur en présence du danger

Smith, père et fils
Le scénario, comme je vous le disais, brillant par sa médiocrité, on pourrait se rattraper sur le casting pour insuffler un minimum de crédibilité à l'ensemble.
Encore raté.
A l'écran vous aurez uniquement Jaden et Will Smith en conf-call pendant 1h30, et qu'est ce qu'ils sont mauvais ! Je vous le disais plus haut, le personnage de Will Smith est cloué dans un fauteuil pendant tout le film. Grosse erreur, vous aurez droit à un festival de gros plan sur Smith vous interprétant la douleur, la peur, la tristesse, la colère...Son fils se débrouille à peine mieux, assurant le minimum niveau action (en même temps c'est pas Predator  non plus, hein...) et tentant de forcer la larmichette lors des faces a face par talkie-walkie avec son père. J'oubliais, y a du trauma sous-jacent dans leur relation, mais n'en disons pas plus. Ces deux là vampirisent le film, mais d'une force...et quand on pense que Smith a refusé Django pour cette daube.

Les forêts de la Perdition
Mais venons en directement à l'essentiel. Shyamalan.
Moi ça me fait mal au cœur de tirer sur cet homme. Je me dis qu'après le four de son dernier film, on l'a lâché de partout et qu'il a cru bon de s'associer avec le clan Smith pour rebooster sa carrière. C'était sans doute pas l'idée du siècle, tant le film ressemble à un super film de vacances friqué, filmé sans envie ni panache.

Il ne subsiste rien du talent de metteur en scène auquel il nous avait habitué dès ses début.
Je me rappelle de la scène émouvante dans Incassable où le fils de Willis demandait en un regard à son père si c'était lui l'homme à la capuche, et ce dernier le regardait sans rien dire. Tout était dit sans un mot. Là, à la fin, on a des retrouvailles cul-cul la praline, remplies de clichés, sans une once d'émotion. Dans les scènes d'action, c'est pas mieux, les molles péripéties n’appelant pas non plus des découpages de fou. Tout juste se réveille t-on lors du saut en chute libre face à l'aigle.

La direction artistique est également à l'ouest, proposant des décors d'une laideur pas possible (les intérieurs de vaisseaux et de maison en début de métrage sont bien pourris), ne tirant jamais profit du cadre et des possibilités des environnements, la forêt notamment.
On assiste à des trucs qu'on ne pensait plus voir sur un écran , à l'image du prologue nous balançant que ce sont les hommes qui ont détruit la terre, avec à l'image des centrales nucléaires et des cheminées d'usine. Tout en finesse le message écolo...

J'aimerais pouvoir dire que bon, le score est quand même sympa, mais non, je trouve que Howard ne s'est pas trop fait suer, et assure le minimum syndical, osant parfois de grandes envolées à la Zimmer, avec un souffle épique qu'on ne retrouve malheureusement pas à l'image.

          Un face à face épique. Spoiler: il s'ensuit une partie de balle au prisonnier pas du tout équitable.

Ce film est une vraie déception, à tous les niveaux, et vu le four qu'il est en de faire au box office US, je souhaite vraiment à Shyamalan de revenir à ce qu'il faisait de mieux. Les petits films fantastiques à twist. C'était bien Sixieme sens..

samedi 1 juin 2013

"Shokuzai, celles qui voulaient se souvenir"

" Shokuzai, celles qui voulaient se souvenir" de Kiyoshi Kurosawa
Genre: Drame et pénitence
Sortie le 29 mai 2013



Parce que le Japon, ce n'est pas que Miike, Sion, Kore-Eda, il est toujours bon de se souvenir que Kurosawa est définitivement un des réalisateurs les plus doués de sa génération. Dans un registre différent (mais complémentaire) des réalisateurs susmentionnés, Kurosawa a réalisé avec Shokuzai, une mini-série, pour la télévision japonaise, et l'a remonté pour une exploitation au Cinéma.
Ce drame fleuve (la version salle, si l'on regroupe les deux volets " qui voulaient oublier " et " qui voulaient se souvenir", dure 4h30) nous présente quatre petites filles, à qui l'on présente une nouvelle venue à l'école. Un jour, alors qu'elles sont en train de jouer, la petite nouvelle se fait enlever, violer et tuer par un inconnu. Malheureusement, aucune d'entre elles n'est en mesure de se souvenir du visage du coupable, ce qui provoque la colère de la mère de la défunte, qui propose un marché aux 4 filles : soit chacune d'entre elles lui offre une compensation, soit elles s'exposent à une pénitence éternelle. Le film nous montre donc ce que sont devenues ces 4 filles, qui essaient de se reconstruire, toujours hantées par le fantôme de leur amie, et régulièrement confrontées à la mère de celle-ci venant, telle la Mort, récolter son dû.

Chapitre 1: la Poupée française.
Première partie consacrée à Sae, jeune femme effacée, discrète et solitaire à qui l'on propose un mariage arrangé. D'abord réticente, elle accepte de rencontrer l'homme qu'on lui présente, héritier d'une famille de riches industriels. Commençant comme une histoire d'amour contrariée, l'homme étant amoureux de Sae depuis leur enfance, le récit dérive progressivement vers un drame malsain, l'époux étant dominateur, possessif, ne trouvant son plaisir qu'en enfermant sa femme à la maison et en la forçant à s'habiller en poupée le soir venu. Plus le récit avance et plus Sae s'enfonce dans sa dépression et dans son enfermement, aussi bien physique que psychologique, ne sachant pas comment s'en sortir, Sae étant une petite fille coincée dans un corps d'adulte, paniquant dès lors qu'elle commence à se rebeller face à son mari et à se " réveiller", et que son corps se réveille lui aussi ( la scène du couloir est d'ailleurs flippante, le cinéma  fantastique de Kurosawa refaisant régulièrement surface, de manière plus diffuse). Ajoutez à cela la visite de la mère lors du mariage de Sae, venue lui rappeler son " engagement". Sae décide alors d'en finir, et d'accomplir ledit engagement...
Cette première partie est disons austère. Pas ennuyeuse, au contraire, mais pessimiste et froide, à l'image de l'existence de Sae, fragile et soumise. Kurosawa adapte d'ailleurs sa mise en scène à son héroïne, usant de grands plans fixes et avec peu de personnages dans le cadre, Sae étant souvent seule, soit avec son mari ou sa mère, et faisant baigner son récit dans une photo grise et triste. Le pessimisme atteint d'ailleurs son paroxysme lors de la dernière scène, où Sae, après avoir commis l'irréparable, va se rendre à la police, et croise en chemin la Mère. Fin de la première partie.

                                            De forts relents de J-horror quand même

Chapitre 2 : réunion de parents d'élèves.
Deuxième partie consacrée à Maki, elle aussi sous la pression de la Mère, et tentant de vivre une existence normale en tant qu'institutrice dans un collège. Maki est donc devenue une personne grave, fermée et sévère, autant avec elle qu'avec les enfants qu'elle a sous sa responsabilité. Sévérité qui lui est d'ailleurs reprochée par le principal du collège. Maki excelle aussi au kendo, seule échappatoire à sa malédiction. Kendo qu'elle va d'ailleurs mettre en pratique lorsqu'un détraqué va faire irruption au collège et menacer des élèves. Signe pour Maki que l'heure de la dette envers son amie disparue et sa mère est peut-être arrivée. Mais ce n'est que le début des emmerdes. La rumeur enfle, faisant ressortir la violence excessive dont a peut être fait preuve Maki lors de l’affrontement avec le criminel, et la lâcheté de son collègue, présent lors de l’agression...la Mère étant bien sûr de la partie.
Deuxième partie plus légère mais tout aussi importante dans le récit. Si Maki a l'ai de s'être mieux débrouillée que Sae, au niveau social, ce n'est pas encore ça. s'étant interdit tout bonheur et auto-condamnée à une vie de pénitence, elle reste écrasée par son passé, et cet engagement envers la mère, qu'elle contacte dès qu'elle a neutralisé le malfrat, pensant qu'avoir commis ce geste rééquilibrera la balance...
Mais comme pour Sae, tout finira mal, sous les yeux de la Mère, fil rouge de ce drame.
Dans cette partie Kurosawa opte pour pour des couleurs plus chaudes, le cadre du collège y est d'ailleurs pour beaucoup, plus de rythme, plus de mouvements de caméra et moins de silences. Le fantastique est d'ailleurs aussi présent, moins subtilement que dans la première partie, et notamment à la fin de cette deuxième partie.

                                        Non, vous n'allez pas rire souvent pendant ce film.

Le sujet du film n'est pas des plus faciles ni des plus fun, nous sommes d'accord. Mais le style de Kurosawa, cette espèce de retenue de tous les instants, ces petites touches de fantastique qui viennent ponctuer le récit, à l'image de la Mère qui vient telle un fantôme sans âge tourmenter les vivantes donnent au film un côté à la fois planant, hypnotique, touchant et à la fois grave. vivement recommandé donc.
Et rendez vous mercredi pour la suite. il reste deux filles et un tueur.