Genre : Fantastique
Durée : 1h34
Sortie le 30 juillet 2014
Amelia élève seule son fils de 7 ans, Samuel, suite au décès de son mari sur le trajet l'amenant à l’hôpital pour l'accouchement. Enfant à problèmes psychologiques et difficile, il rend la vie compliquée à sa mère qui ne connait plus de repos. Seule manière de le calmer, lui lire des histoires avant de dormir. Un jour, Samuel découvre un livre racontant l'histoire du Babadook, le monstre du placard. Et très vite imaginaire et réalité commencent à se mélanger.
Petit phénomène 2014 du Cinéma Fantastique ayant écumé nombre de festivals dont celui de Gerardmer où il raflé la mise en repartant avec le Prix du jury, le Prix du public, le Prix de la critique et le Prix du jury jeune du conseil régional de Lorraine (il manquait une récompense...), The Babadook déboule ni vu ni connu sur les écrans en plein été, période propice aux blockbusters de qualité diverse et aux autres petits films moins mis en avant d'un point de vue marketing (Pas de stars, réalisatrice inconnue, et affichage réduit au minimum) mais dont la réputation leur garantit quand même une bonne place dans la liste des films qu'il faudra voir cet été. C'est chose faite donc. Alors le film est il à la hauteur de sa réputation et ses multiples récompenses ?
Pour répondre de manière simple : Oui et non. Pourquoi me direz vous ? Parce que paradoxalement c'est quand le film sort de son statut de film de genre avec son boogeyman pour enfant qu'il devient intéressant. Deux niveaux de lecture s'offrent à nous.
Premier niveau de lecture : C'est un film fantastique qui vous fera sursauter avec une ambiance flippante, en usant du trauma collectif enfantin sur le fameux monstre caché dans le placard ou sous le lit.
Ce n'est clairement pas dans cette optique que le film sera le plus remarquable et original. Pas original pour un sou, le film sort très rarement des sentiers battus et labourés jusqu'à l'usure des films de genre ayant un sujet similaire à Babadook. Planchers qui grincent, jump-scares, ombres dans le coin noir de la chambre, tout y est. D'autres films récents comme The Conjuring ou dans une moindre mesure Màma arrivaient respectivement à transcender ces clichés et à innover dans les idées pour mettre en scène une entité perturbatrice et intrusive dans une cellule familiale. Ici, le Babadook est finalement peu effrayant et on ne ressent jamais vraiment l'aura malfaisante et violente que peut avoir le monstre. C'est dommage en un sens, le fameux livre que lit la mère contient des images qui auraient été vraiment flippantes si elles avaient été exploitées à fond. Donc non, The babadook n'est définitivement pas LE film qui vous fera peur cet été.
Deuxième niveau de lecture : Le babadook est un monstre, mais pas uniquement.
Si le côté film fantastique / Film de trouille ne fonctionne pas toujours, le fond du métrage se révèle beaucoup plus riche et intéressant à analyser. En effet, on peut voir ce film et les mésaventures de la mère comme une métaphore de ce que peut être la vie d'une femme seule, que la vie a bien esquinté, portant le poids de la culpabilité pour la mort de son mari et devant s'occuper seule de son fils hyperactif et fatigant. Oui il n'est pas facile d'avoir une vie quand on se consacre le jour à des vieux en maison de retraite et et la nuit à un enfant trouillard dangereux à bien des égards. La détresse psychologique et la fatigue du personnage de la mère se fait de plus en plus ressentir au fur et à mesure que le film progresse, au rythme des attaques du babadook. C'est ce qui amène à la conclusion que le Babadook serait une représentation physique (et purement imaginaire, pourquoi pas) de l'état d'esprit de la maman, dont les sentiments envers son fils sont à la fois bienveillants (elle craint pour la sécurité et la santé de son fils) et inquiétants, faisant émerger à intervalle régulier une sorte de rancœur et de transfert de culpabilité parfois très agressifs (possédée par le babadook, elle en vient à lui dire qu'elle aurait préféré rester avec son mari plutôt qu'un enfant insupportable). Autre élément pouvant étayer cette théorie, la réapparition du livre. dans un état de panique, Amelia déchire le livre et le jette. Le lendemain elle le retrouve sur le pas de la porte. Au vu de l'état de fatigue dans lequel se trouve Amelia, on en vient à se demander si, à l'image de ces ellipses temporelles brutales "coucher/réveil", elle ne commencerait pas à perdre les pédales et expérimenter des crises d'amnésie, doublées d'une paranoïa grandissante.
Même interrogation en fin de métrage lorsque le Babadook prend la forme du mari défunt pour emporter avec lui Samuel et la séquence qui s'ensuit, qui même si elle verse dans le fantastique pur et dur, peut aussi être interprétée comme une façon de dire qu'il faut apprendre à vivre avec son passé au quotidien, même si celui-ci est mort et enterré.
D'un point de vue général, les deux niveaux de lecture se complètent finalement, le côté fantastique ne prenant jamais trop le pas sur le sous-texte plus intimiste du récit. Ceci étant on pourra toujours regretter le manque de suspens et d'effroi que l'on pouvait être en droit d'attendre au vu du sujet (Le Babadook est peut être une métaphore, il reste quand même un monstre) et pinailler sur le fait que certains points ne sont jamais clairement développés (quid de l'encre noire que vomit Amelia dans la cave). Le film est une réussite certes, mais une réussite mineure. Reste quand même à saluer la venue d'une nouvelle réalisatrice dans la grande famille du Cinéma Fantastique, qui sait faire preuve de justesse et d'une sensibilité rares dans ce genre de production.
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