13Cine

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lundi 14 juillet 2014

Under the skin

Under the skin de Jonathan Glazer
Genre : fantastique
Durée : 1h47
Sortie le 28 juin 2014


Une jeune femme sans nom erre dans les rues d'une ville écossaise à la recherche d'hommes qu'elle fait disparaître après les avoir séduit, le tout sous l'étroite surveillance d"un mystérieux homme à moto.

A vrai dire, cette année, ça fait déjà deux films dont je sors et dont je ne sais pas quoi penser. Le premier c'était L'étrange couleur des larmes de ton corps (critique par ici), avec sa sur-stylisation et ses choix de mise en scène aux frontières de l'expérimental, avec au passage un hommage aux giallos transalpins. Le film de Glazer fait le même effet. On ne sait pas si on a regardé un film d'une simplicité extrême mais bien raconté et stylé ou une grosse oeuvre prétentieuse avec une mise en scène idoine.
Adaptation du roman de Michel Faber et troisième film de Glazer après Sexy beast et le sulfureux Birth avec Kidman, Under the skin est un film qui prend son temps et donne souvent l'impression de ne pas avoir de réel arc narratif, tant le métrage ressemble à une succession de séquences durant lesquelles le personnage principal interprété par Scarlett Johansson piège des hommes dans sa camionnette et les fait disparaître dans une chambre noire et mystérieuse. Peu ou pas de dialogues entre les personnages, si ce n'est une sorte de séduction maladroite de la part de l’héroïne pour attirer les mâles en manque de contact. On ne sait pas trop vers quoi on se dirige, peu ou pas d'informations sont données quant à la réelle nature de la femme (spoiler : regardez l'affiche ci dessus, vous aurez la réponse. En même temps les diverses interviews et critiques sur le web vous ont déjà tout flingué niveau suspens) et le rythme n'est pas des plus trépidants. Et c'est justement là que se cache la force du film, ou son plus gros défaut, cela dépendra de votre sensibilité ou votre humeur. A l'instar du film de Cattet et Forzatti, le métrage de Glazer exige du spectateur une totale confiance et une vraie envie de perdre ses repères pour apprécier le film à sa juste valeur. D'ailleurs les premiers plans du film feront tout de suite le tri entre les réfractaires et les curieux. Enchaînement de plans abstraits, de lumières et de flash, suivis d'une scène muette aux limite du théâtre d'ombres chinoises durant laquelle on découvre le personnage principal en train de dépouiller une femme pour lui voler son identité. Si vous n'accrochez pas aux premières minutes du film, vous allez passer 1h45 à vous demander quel est l'intérêt du film, et pourquoi Johansson passe son temps soit habillée comme une cagole écossaise soit à poil dans une chambre noire à regarder des mecs surexcités se faire engloutir par un grosse flaque noire  qui leur pompe leurs chair et leurs fluides. Si vous êtes plus curieux et réceptifs, la suite peut être perçue comme un récit initiatique, découverte du monde par une extra terrestre vampirique obligée de piéger les hommes pour survivre. Et c'est dans cette optique que le film devient fascinant. La caméra de Glazer suit de près son héroïne au fil de ses rencontres, entre boîtes glauques et parkings malfamés, et nous présente le personnage principal comme un prédateur  ne semblant éprouver ni remords ni distinction envers ses proies, elle n'y voit que des éléments nécessaires à sa survie. Au départ froide et inhumaine, sa  vraie nature au fond, sans aucune compassion (le bébé sur la plage), elle se découvre en même que le spectateur et ne semble pas comprendre pourquoi les hommes lui tournent autour et la regarde avec autant d'intérêt bien que sa survie en dépende (cf la scène où nue, elle découvre son corps dans la glace) et suite à une tentative de séduction ratée sur  une victime rejetée par son piège, elle tente de trouver d'autres moyens de "s'alimenter" (la scène du gâteau au chocolat), et c'est dans une dernier acte noir et désespéré que la femme  E.T va découvrir la vraie nature des hommes, après avoir baissé sa garde, loin de son protecteur.


Pour raconter l'histoire de son extra terrestre, Glazer opte pour une mise en scène sobre et osons dire lente, voire hypnotique. Entre errances nocturnes de l’héroïne sur les routes écossaises et séquences de "sexe" par goudron noir interposé complètement surréalistes, le film baigne dans une sorte d'ambiance mi tendue mi cotonneuse, à laquelle s'ajoute un score minimaliste et sobre. Entrelardé d'instants purement psychédéliques (que représentent-ils ? l'esprit tourmenté de l’héroïne ?), de plans magnifiques de la campagne écossaise et de scènes qui semblent avoir été filmées sur le vif dans les rues d'une ville glauque et anonyme, le film se vit comme une sorte de doux cauchemar ouaté, sans action ni sursaut, et la violence du dernier acte vient réveiller le spectateur un peu hypnotisé par ce qui a précédé, le tout culminant dans un plan final de toute beauté, violence sortie de nulle part dans un champs enneigé.

Bref : Film de science fiction au réalisme cru ou expérience sensorielle et cinématographique en compagnie de Scarlett Johansson, le dernier métrage de Glazer mérite le détour, à condition de se laisser prendre au jeu d'une mise en scène parfois aux limite de l’expérimentation sur grand écran.


Et le petit extrait de la BO qui va bien, composée par Mica Levi.

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